Réalisateur culte pour certains,
hipster sur-estimé pour d'autres Kevin Smith ne fait pas l'unanimité et ça ne
changera pas de sitôt. Son Red
State, première incursion dans l'horreur avait su être convaincant malgré
quelques lacunes et c'est donc avec beaucoup de curiosité qu'était attendu son
retour à ce registre. C'est désormais chose faite avec Tusk: un
film schizo, complètement barré et qui tient aussi la promesse
du titre, celle de placer la célèbre chanson des Fleetwood Mac dans un film
d'horreur. Faut le faire.
Peut-on faire un film à partir de
n'importe quoi? Par exemple, supposons que vous soyez avec un pote entrain de
vous en payer une bonne tranche, derrière le micro de votre podcast -oui,
supposez que vous soyez podcaster du coup-. Supposons que vous soyez aussi
passablement stone et que vous vous mettiez à inventer le pitch le plus dingue
pour votre prochain film, un truc franchement craignos, mais en même temps
super hilarant quoi. Genre, un type kidnappe un autre mec et le
transforme en morse pour lui tenir compagnie. Et bien si votre nom est Kevin
Smith et que celui de votre ami soit Scott Mosier, la réponse est : Oui, parfois
c'est aussi simple que ça. C'est en tout cas l'origine de ce film un peu
particulier qui signe le retour au registre horrifique de Kevin Smith.
Cependant, point de message politique en filigrane ici, il s'agira surtout de
l'adaptation pure et simple de ce délire de garçons attardés, hybride entre
comédie potache et film d'épouvante peu avare en scènes choc.
Une fois n'est pas coutume,
commençons par la fin et faisons un point sur tout ce qui ne va pas avec Tusk, en commençant par le plus
évident: Est-ce que ça tient la route ? Pour une blague douteuse sortie un soir
de cuite, évidemment non. Le film de Kevin Smith aurait été parfait en court
métrage, en un segment d'une anthologie horrifique mais il faut avouer qu'en
tant que long, ça sent vachement la rallonge pénible. Smith ne se prive pas de
digresser à la moindre occasion en voulant étoffer son récit par des
sous-intrigues sympathiques tout au plus, mais qui n'apportent rien à la trame
- les états d'âme de la petite amie du personnage principal, les flash-backs
censés montrer à quel point c'est un connard, la tromperie avec son meilleur
ami... - . L'intrigue de trop sera sans aucun doute celle de la mini enquête
menée par l'ami -Joel Haley Osment, à la limite de l'obésité- et la gonzesse du
héros qui, non seulement est ridiculement simpliste mais qui sert uniquement de
prétexte à un caméo hallucinant d'un Johnny Depp -oups, spoiler- en roue libre.
Le résultat sera laissé à l'appréciation du spectateur qui prendra ça comme une
blague de plus ou comme un bras d'honneur de la part de Smith.
Une chose est sûre, Tusk recèle une grande propension à
partir d'une minute à l'autre dans le n'importe nawak, ce qui ressemble
finalement beaucoup à son papa. Smith joue beaucoup avec les sentiments du
spectateur -en même temps qu'avec ceux du héros- et instaure une ambiance
étrange, tantôt drôle, tantôt glauque. Aux blagues pipi-caca et vannes sur le
Canada succèdent en un éclair des scènes de body
horror que n'aurait pas dénigré un Human
Centipede. On rit beaucoup certes, mais ces rires deviennent jaunes, puis
franchement parano tant on a l'impression d'avoir le cul entre deux chaises. Le
final quand à lui vient mettre en exergue tout le malaise instauré depuis le
début et constitue un sommet de mauvais gout et d'humour noir, franchement
couillu. C'est justement ce qui fera la singularité du film. Il serait bon
aussi de signaler que, même si c'est une vaste farce, Tusk est superbement bien filmé et
bénéficie de terrifiants maquillages signés Robert Kurtzman - Evil
Dead III, Une Nuit en
Enfer, Le Monde
Fantastique d’Oz -. Cerise
sur le gâteau, Michael Parks en grand taré psychopathe au verbe aussi facile
que la lame et Justin Long en trou du cul qui en chiera des masses viennent
achever le paysage général de ce film ouf.
Film curieux, glauque,
complètement fou et jusqu'au-boutiste, Tusk ne plaira pas à tout le monde mais ne
laissera personne indifférent. Doté de qualités techniques indéniables
mais malheureusement plombé par trop de faiblesses structurelles,
il prouve non seulement que Kevin Smith est décidément increvable mais
surtout qu'on peut faire un film sur absolument n'importe quoi pour peu qu'on y
mette un tant soit peu de créativité.
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