Rachel, une agent de police récemment transférée dans un village de campagne, arrête le seul criminel du coin lors de sa première tournée de nuit. Si elle l’arrête facilement, elle ne tarde pas à découvrir que sa présence au commissariat fait remonter à la surface le passé trouble de la petite communauté. Et ces réminiscences prennent des formes diverses : massacre d’une famille entière, crime homophobe...
Petit film
d'horreur irlandais, Let Us
Prey serait passé
relativement inaperçu si ce n'était la présence au casting de Liam Cunningham -
oui, le mec de Game Of Thrones-.
Ça aurait été une grave injustice car la première réalisation de Brian O'Maley
déroule de sérieux arguments qui la placent très haut dans le rang des petites
productions horrifiques proliférant sur les étagères de votre vidéothécaire
préféré. D'une maîtrise technique indéniable, Let Us Prey se révèle d'une redoutable efficacité
lorsqu'il s'agit de relever le trouillomètre et ce, avec une économie de moyens
qui force le respect.
Let Us Prey donne le ton dès les premières minutes avec des
plans d'une beauté à couper le souffle : des flots d'écume furieux s'écrasant
sur les récifs rocheux irlandais. Au milieu, un homme sorti de nulle part
se met en route, accompagné par une nuée de corbeaux. Cet homme, dont la nature
maléfique ne fait aucun doute, sera l'élément catalyseur
des événements funestes qui suivront. Il est déjà rare de prendre la
peine de soigner le générique dans ce genre de films, ça l’est encore plus de
le faire d'une manière aussi pertinente. Let
Us Prey ne perds donc pas une
seconde et commence à construire minutieusement son récit en plantant le décor
-le commissariat d'une bourgade qui a tout d'une ville fantôme- et en
présentant sa galerie de personnages, qu'il place comme des pions sur un
échiquier. Une analogie qui n'est pas très loin de la vérité puisque c'est bien
une macabre partie d'échec qui se jouera sous nos yeux, en ces lieux
perdus.
Le film suit la ronde de nuit d'une nouvelle recrue, Rachel Heggie, récemment transférée au commissariat d’un patelin complètement paumé dans la lande irlandaise. Grande gueule et droite dans ses bottes, elle a du mal à s'intégrer surtout que ses collègues ont l'air d'être de sacrées raclures. Inutile de préciser que la nuit qu'elle va passer sera mortellement intense. Si la bouille de Rachel vous semble vaguement familière, c'est normal, il s'agit de Pollyanna McIntosh, the woman dans The Woman. Elle campe ici une héroïne Badass dans la plus pure tradition du survival d'horreur. Oui, vachement bonne aussi, ce que ne laissait pas paraître the Woman, mais cela est une autre histoire. Toujours est-il qu'elle sera le personnage central dont la caméra ne déviera presque jamais tout au long du métrage. Ce sera d'ailleurs elle qui fera rentrer le loup dans la bergerie. Loup en la personne de l'inquiétant Liam Cunningham au contact duquel les choses tournent au vinaigre à mesure que les secrets les plus glauques refont surface. Si les prémisses du récit ne sont pas des plus originales -on lorgne autant du côté du cinéma de John Carpenter que de l'univers littéraire de Stephen King- la suite s'avère par contre extrêmement bien troussée et pas mal surprenante.
Brian
O'malley, dont c'est pourtant le premier
long, s’acquitte d'un film formellement impeccable. Connaissant
sa grammaire cinématographique sur le bout des doigts, le réalisateur soigne
chaque plan grâce à une belle gestion de la lumière et des décors contribuant
ainsi à créer une tension continue et une sensation d'étouffement même dans les
-rares- plans extérieurs. Comme chez Carpenter, un soin évident à aussi été
apporté au sound design avec sa musique électronique minimaliste et insidieuse
qui garantit une immersion totale -en plus de rendre plus efficace les jump scares obligatoires-. Tout ceci aurait pu
sentir l'hommage à peine déguisé où virer à la simple copie appliquée si ce
n'est que Let Us Prey tente un coup de poker scénaristique
assez couillu, mais qui pourrait laisser une grande partie de l'audience, la
plus sceptique, sur le bas-côté : le scénar' s'appuie sur un concept
religieux rabâché et fourre-tout mais qui s'avère libératoire et
ouvre des possibilités infinies. Dès lors, on ne s'étonnera pas trop de la
-grosse- coïncidence qui a réuni autant de psychopathes en un seul endroit, la
même nuit : Ce ne sont après tout que des âmes damnées dont le châtiment ne
saurait tarder. Un châtiment bien entendu mis en image avec force détails et
une générosité qui fait chaud au cœur. Tout ceci nous mène vers un dernier
tiers explosif et confirme le grain de folie qui planait sur le métrage jusque
là. C'est justement ce côté extrême qui pourra diviser mais cette démesure
reste indéniablement bienvenue, rien qu'à voir la prestation
"démente" de Douglas Russell en shérif biblique.
Rien de
transcendant dans Let Us Prey mais un film d'horreur solide et bien
foutu. Malgré de grosses ficelles scénaristiques et un thème fourre-tout, le
résultat est une franche réussite qui augure le meilleur pour son
réalisateur.
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